Description
EXTRAIT DU LIVRE
Alex se tourna de côté. Le soleil passait, blafard, entre des rideaux épais vaguement bousculés par le vent. Pas envie de bouger, juste envie de rester à flotter ainsi, sans se laver, sans rien décider, passif absolument.
Pour les sauvages, dans leur cité, l’été c’était l’enfer. Vers midi, les réveils difficiles trouvaient pour seul horizon le sordide immeuble d’en face. Quelle que soit leur couleur de peau, ils étaient tous blêmes et les murs blancs renvoyaient un étrange sentiment de mal de tête persistant.
Le mal-être était palpable, impossible de ne pas être oppressé, angoissé. Alors, l’alcool circulait.
La balle fit sauter la moitié du visage. La joue, le nez, l’œil furent explosés ; la cervelle de la jeune femme se mêla à son sang sur le guichet de la banque.
L’un des deux complices de Manu tira deux fois sur l’homme au sang-froid, qui ne porta jamais si bien son nom.
Deux vies arrêtées, terminées, rideau.
Plus rien ne serait dit par ces lèvres, plus une caresse ne serait donnée par ces mains, plus une envie, plus un rêve.
« La bête, c’est comme ça qu’on l’appelle et c’est comme ça qu’il vit.
On est un peu moins jeune, il fait encore moins chaud. On devient presque pâles. On n’ira jamais dans ces beaux quartiers. Les gamins qui sont nés entre-temps grandissent, vont à l’école, mais ce sont toujours eux qui ramènent de mauvaises notes. Ils commencent à porter de larges pantalons et des casquettes de travers.
Et puis, arrive inévitable le temps de la renonciation. Le père s’est fait virer. Plus moyen de trouver du travail, on ne veut plus de lui nulle part. Il picole. Il est volage. Sa femme lui crie dessus. Alors, quand il a trop bu, il cogne, puisque c’est la forme masculine de la violence. La violence de la femme, elle, se trouve dans les paroles, ce flot d’insultes et de reproches.
Mais, peu à peu, la rumeur s’était transformée en quasi-certitude : ils étaient là, tout près, mais invisibles. De temps à autre, ils quittaient les lieux sombres pour quelques teufs ultra-fermées où ils vidaient leurs têtes. Mais, ce matin-là, pour sûr, les rats étaient vraiment sortis de leur trou.
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